Miguel Diaz-Canel, un “homme du système” au service de la transition cubaine

Le Président Cubain, Miguel Diaz-Canel (Photo: ALFREDO ESTRELLA / AFP)

Miguel Diaz-Canel, un ingénieur en électronique de 62 ans, souvent vu en jeans et adepte des réseaux sociaux, assure depuis 2018 la délicate transition à Cuba entre les leaders historiques de la révolution et la nouvelle génération qu’il incarne.

Par Leticia PINEDA

Celui qui est devenu le premier président civil de l’île caribéenne en plus de six décennies en prenant la relève de Raul Castro (2008-2018), a été réélu mercredi pour un second et dernier mandat de cinq ans à la tête d’un pays où toute opposition est illégale.

Avec son arrivée au pouvoir, Miguel Diaz-Canel a mis fin à la tradition de l’uniforme vert de ses illustres prédécesseurs Fidel (1926-2016) et Raul Castro, son expérience dans l’armée se résumant peu ou prou à son service militaire dans une unité de missiles antiaériens.

Né après la révolution cubaine de 1959, il a souvent été vu en jeans ou arborant une casquette et n’a jamais caché sa passion pour les Beatles. En tant qu’homme politique moderne, il utilise en outre régulièrement les réseaux sociaux pour transmettre ses messages et promouvoir son image.

Dans un style différent de celui des frères Castro, ce père de deux enfants nés d’un premier mariage se plaît à se montrer sur Twitter avec sa deuxième épouse Lis Cuesta, qui l’accompagne fréquemment dans ses déplacements à Cuba ou à l’étranger.

– “Homme du système”-

Cependant, malgré ces signes de modernité, celui qui a fait toute sa carrière politique au sein du Parti communiste cubain (PCC), allant jusqu’à en prendre la présidence en avril 2021 en succédant encore une fois à Raul Castro, ne déroge pas à ses principes idéologiques.

Son ascension débute en 1994, au moment où l’île subit la coupure des subsides vitaux fournis par Moscou : il est alors nommé premier secrétaire du PCC dans sa province natale de Villa Clara (centre).

Il occupe ensuite les mêmes fonctions dans la province stratégique d’Holguin (est), riche en matières premières. En 2003, il fait son entrée parmi les quinze membres du bureau politique, la plus haute instance du parti.

Pendant toute cette période rendue difficile du fait de la chute de l’Union soviétique, il parcourt à bicyclette les rues de sa ville natale qui, comme le reste du pays, souffre d’une grave pénurie d’essence.

Lors de son élection en avril 2018, Raul Castro avait révélé qu’il était “le seul survivant” de la dizaine d’aspirants au poste présidentiel.

“Il n’a jamais été un démocrate libéral limité par le pouvoir de Fidel et de Raul, c’est un homme du système” qui ne cherche pas à changer de modèle politique, assure l’expert cubain en relations internationales basé aux Etats-Unis Arturo Lopez-Levy.

– “Cicatrices” –

Pendant son mandat, l’internet mobile, arrivé sur l’île à partir de fin 2018, est déconnecté dans les moments de tensions sociales, comme au cours des manifestations historiques du 11 juillet 2021.

Il fait également preuve d’inflexibilité face à ces actions de protestation inédites depuis 1959, incitant même les partisans du régime à investir le pavé.

Ces manifestations spontanées aux cris de “Liberté !” et “Nous avons faim !” ont fait un mort et des dizaines de blessés. Quelque 1.300 personnes ont en outre été arrêtées, dont près de 500 ont été condamnées à des peines allant jusqu’à 25 ans de prison, selon l’ONG Cubalex, qui a son siège à Miami.

Elles ont éclaté dans un contexte de pression maximale due au durcissement de l’embargo économique imposé par Washington et de crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19.

Chargé de rendre viable le projet économique voulu par Raul Castro depuis 2011, Miguel Diaz-Canel a mis en oeuvre une réforme monétaire, encouragé le travail indépendant et autorisé les PME.

Cependant, ces mesures ont déclenché une inflation sans précédent qui a exaspéré les Cubains, dans un contexte de pénurie de nourriture, de médicaments et de carburant.

“Il n’a pas traversé cette période sans cicatrices”, souligne Arturo Lopez-Levy, estimant qu'”en fin de compte, la plus grande mesure du succès d’un dirigeant cubain post-révolutionnaire est la survie du gouvernement”.

Source: AFP