Présidentielle en Ouganda: l’opposant Bobi Wine arrêté après s’être enregistré comme candidat

Le musicien et député ougandais Bobi Wine (au centre) lors d'une manifestation

Le populaire chanteur Bobi Wine, principal adversaire du président Yoweri Museveni à la présidentielle de 2021 en Ouganda, a été arrêté mardi et retenu plusieurs heures à son domicile par la police, immédiatement après avoir enregistré sa candidature.

A sa sortie de la Commission électorale, des policiers en uniforme ont brisé les vitres de la voiture de M. Wine, député de 38 ans, l’en ont sorti, puis l’ont embarqué dans un véhicule qui a démarré, selon des images diffusées en direct à la télévision.

Selon David Lewis Rubongoya, secrétaire général de la Plateforme de l’Unité nationale (NUP), parti de Bobi Wine – nom d’artiste de Robert Kyagulanyi -, celui-ci a été ramené sous la contrainte à son domicile.

M. Wine a affirmé à l’AFP par téléphone avoir été retenu sur place, durant plusieurs heures, à l’intérieur d’un véhicule de police, et y avoir été torturé. Les policiers ont quitté ensuite l’enceinte de son domicile, mais restent fortement déployés dans le quartier, a-t-il ajouté.

“La torture, le tabassage ont eu lieu dans le véhicule de police où j’ai été détenu pendant près de trois heures”, a-t-il expliqué. “Ils m’ont aspergé de gaz lacrymogène (…) un métal brûlant a été placé dans mes mains, j’ai des cicatrices partout, tout mon corps souffre”, a-t-il ajouté, promettant de “ne pas abandonner”.

Durant la journée, armée et police avaient bloqué les rues menant au domicile du député et chanteur, star dans son pays, et “tiré des gaz lacrymogènes pour disperser ses partisans”, rassemblés devant son domicile, avait également déclaré David Lewis Rubongoya.

Interrogé par l’AFP dans la journée, le porte-parole de la police de Kampala, Patrick Onyango, avait refusé de confirmer l’arrestation de M. Wine ou de commenter spécifiquement l’action de la police contre lui à la sortie de la Commission électorale, indiquant simplement que l’opposant se “trouvait à son domicile”.

“La police a mis en garde tous les candidats à la présidentielle contre toute infraction aux directives arrêtées par la commission électorale et la police, mais Bobi Wine avait appelé ses partisans à défiler, contrevenant aux mesures de lutte contre le Covid-19”, a néanmoins expliqué le porte-parole, “toute mesure prise par la police à cet égard était justifiée”.

– “C’est dégoûtant” –

Lundi, M. Wine avait dit espérer que la police se comporte avec ses partisans “de la même façon” qu’avec ceux de M. Museveni, qui avaient pu se rassembler la veille sur le chemin emprunté par le chef de l’Etat pour aller enregistrer sa candidature.

Yoweri Museveni, 76 ans, au pouvoir depuis 1986, briguera début 2021 un sixième mandat.

Un autre candidat, Patrick Oboi Amuriat, est arrivé mardi à la Commission électorale dans un véhicule de police, dont il est sorti, devant les caméras, débraillé et sans chaussures.

Il a indiqué à l’AFP avoir été contraint de monter dans ce véhicule: “on m’a enlevé mes chaussures, je suis en chaussettes, mon costume a été souillé”, a-t-il montré, “c’est dégoûtant (…) mais c’était prévisible de la part d’un régime décidé à tout prix à s’accrocher sans vergogne au pouvoir”.

“Si on peut me maltraiter moi, un candidat à la présidentielle allant s’enregistrer, comment traitent-ils les sans-voix?”, a souligné M. Amuriat, candidat du Forum pour le changement démocratique (FDC), parti de Kizza Besigye, opposant historique à M. Museveni.

Le porte-parole de la police de Kampala a justifié que M. Amuriat soit amené par la police car il avait également prévu d’organiser un défilé “à l’encontre des directives électorales” liées au Covid-19″.

“En ce qui concerne la perte de ses chaussures, c’est une question qui doit faire l’objet d’une enquête”, a-t-il ajouté.

Source: AFP