Les habitants de Johannesburg vont se coucher lundi soir dans une ville dirigée par l’opposition, l’ANC ayant été battue par l’Alliance Démocratique (DA) comme à Pretoria et Port Elizabeth la semaine dernière, une première depuis l’avènement de la démocratie dans ce pays en 1994.
Herman Mashaba, candidat de la DA, a obtenu lundi soir 144 voix contre 125 pour Mpho Parks Tau, son rival qui représentait le Congrès National Africain (ANC), pour l’élection du maire de la plus grande ville d’Afrique du Sud.
Lors du scrutin municipal du 3 août, la DA était arrivée en deuxième position avec 104 sièges (sur 270) derrière l’ANC qui avait obtenu 121 sièges.
Mais comme dans la capitale Pretoria vendredi, la DA a obtenu le soutien du parti arrivé en troisième position, les Combattants pour la liberté économique (EFF) du populiste Julius Malema, ainsi que celui de plusieurs petits partis pour rafler la mairie. C’est la première fois depuis la fin de la dictature raciste de l’apartheid en Afrique du Sud et l’avènement de la démocratie il y a 22 ans que l’ANC ne contrôle pas la ville de Johannesburg.
Quatre des six plus grandes métropoles du pays, Johannesburg, Pretoria, le Cap (sud-ouest) et Port Elizabeth (sud) sont désormais gouvernées par des maires de l’opposition.
L’ANC a gardé sa majorité absolue dans la métropole de Durban (sud-est) et est en ballottage à Ekhuruleni – grande métropole industrielle de l’est de Johannesburg – qui vote mardi pour élire son maire.
Au niveau national, le parti de Nelson Mandela a essuyé un revers historique lors de ces élections municipales, en enregistrant le score le plus bas de son histoire, avec moins de 54% des voix.
Le vote de Johannesburg a été retardé lundi par le décès d’une conseillère municipale de l’ANC qui, après un malaise, s’est effondrée dans la salle du conseil, quelques minutes avant l’élection du maire.
– Millionnaire noir autodidacte –
“Nous allons apporter le changement, un changement qui va créer des emplois pour notre peuple”, a lancé Herman Mashaba après son élection.
“Il n’est pas juste qu’aujourd’hui des gens vivent sans toilettes dans une métropole qui est vue comme une ville de classe mondiale”, a-t-il ajouté, précisant qu’il voulait “rendre de la dignité” à ses habitants.
Millionnaire autodidacte noir sud-africain qui aura 57 ans vendredi, M. Mashaba a fait fortune à la fin de l’apartheid en créant une marque de produits de beauté intitulée “Black Like Me”. Fils d’une femme de ménage, il a grandi dans la pauvreté dans un township près de Pretoria et a enchaîné les petits emplois avant de lancer sa propre entreprise.
Son investissement en politique, du côté des libéraux de la DA, demeure très récent puisque ce scrutin municipal constituait sa première campagne électorale.
“A partir de ce soir, la corruption est notre ennemie numéro un”, a également affirmé l’homme d’affaires désormais édile. Plusieurs analystes expliquent le recul de l’ANC dans les urnes par les scandales de corruption qui entourent le deuxième mandat du président Jacob Zuma. Mais depuis le scrutin, le parti a exclu toute démission du chef de l’Etat.
Comme Solly Msimanga, candidat de la DA et élu à Pretoria vendredi, Herman Mashaba devra cependant manier l’art du compromis pour gouverner Johannesburg. S’il a bénéficié du vote de l’EFF pour être élu, le leader du parti de gauche radicale Julius Malema a fait clairement savoir qu’il ne s’agissait pas d’une coalition.
Les maires DA devront donc trouver des points d’entente au cas par cas avec EFF pour faire passer leurs mesures. Une gymnastique qui semble complexe tant les différences idéologiques entre le parti libéral et celui de gauche radicale sont profondes.
Source: AFP