Plusieurs hauts responsables de l’ONU ont appelé mardi les dirigeants du Soudan du Sud à mettre durablement un terme aux violences qui ont secoué la capitale Juba ces derniers jours et à ne pas empêcher les populations civiles de trouver refuge ailleurs, notamment auprès des sites et camps de l’ONU.
Lors d’un point de presse au siège de l’ONU, à New York, la Représentante spéciale de l’ONU au Soudan du Sud, Ellen Margrethe Loej, a appelé le Président Kiir et le Premier Vice-Président Riek Machar à respecter le cessez-le-feu annoncé la veille par les deux hommes.
D’après les dernières informations transmises par la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), dont Mme Loej est la responsable, le cessez-le-feu semble pour l’instant se maintenir dans la capitale Juba, a-t-elle précisé.
La Représentante spéciale a par ailleurs exhorté les forces de sécurité à Juba à garantir un « accès sans entrave » aux patrouilles de protection des civils de la MINUSS, ainsi qu’à permettre aux civils de se déplacer librement pour trouver refuge. Elle a exhorté le gouvernement à ouvrir des couloirs humanitaires pour permettre aux Nations Unies et aux acteurs humanitaires d’acheminer de l’aide.
Depuis le début des combats dans la capitale, Mme Loej a précisé qu’environ 5.000 personnes supplémentaires avaient trouvé refuge dans le camp de la MINUSS de Tomping à Juba. Elle a ajouté que 3.000 autres déplacés avaient été transférés vers l’un des sites de protection des civils de la Mission dans la capitale. Au total, 36.000 personnes auraient été déplacées dans les violences des derniers jours.
« Nous sommes extrêmement préoccupés par la détérioration rapide de la situation sécuritaire et des droits de l’homme au Soudan du Sud », a de son côté déclaré une porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH), Cécile Pouilly, lors d’un point de presse à Genève, en Suisse.
Depuis jeudi 7 juillet, la capitale Juba a été le théâtre d’affrontements répétés entre les soldats fidèles au Président Kiir et ceux qui soutiennent le Premier Vice-Président Machar, a rappelé Mme Pouilly, ajoutant que, selon les chiffres du gouvernement, au moins 272 personnes ont été tuées jusqu’à présent dans les violences, dont 33 civils.
La porte-parole a rappelé qu’en dépit de l’appel au calme lancé par les deux dirigeants lors d’une conférence de presse conjointe, vendredi 8 juillet, suivi d’une brève accalmie le lendemain, des combats violents ont repris à Juba dimanche et lundi.
« Nous sommes profondément préoccupés par les rapports faisant état de civils à qui ont empêcherait de se réfugier dans les locaux de la MINUSS, dont certains se seraient faits tirer dessus », a déclaré la porte-parole. Elle s’est dite également préoccupée par les informations concernant les attaques visant directement les camps et sites de protection des civils de la MINUSS à Juba. « Selon MINUSS, huit personnes ont été tuées et 59 blessées, dans ou autour des sites de protection des civils entre dimanche et lundi », a-t-elle précisé.
Mme Pouilly s’est aussi déclarée extrêmement inquiète face aux indications selon lesquelles la violence aurait commencé à se propager à d’autres États.
« Nous appelons les deux dirigeants à faire preuve de leadership, à faire un effort concerté et authentique pour empêcher leurs forces respectives de s’affronter, ainsi qu’à faire tout leur possible pour assurer la protection de la population civile », a déclaré la porte-parole du HCDH.
De son côté, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a appelé à maintenir ouvertes les frontières entre le Soudan du Sud et les pays limitrophes, pour faire face un possible afflux de réfugiés tentant de fuir le pays dans les prochains jours.
« Le HCR exhorte toutes les parties au conflit armé à garantir le passage sans danger aux personnes fuyant les combats […] et nous exhortons les pays voisins à garder les frontières ouvertes aux personnes en quête d’asile », a déclaré un porte-parole du HCR, Leo Dobbs, lors d’un point de presse à Genève.
l’embargo sur les armes et des sanctions ciblées supplémentaires
Le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a vivement dénoncé lundi la reprise des combats ces derniers jours dans la capitale du Soudan du Sud, Juba, appelant le Conseil de sécurité de l’ONU à imposer un embargo immédiat sur les armes dans le pays et à prendre des sanctions ciblées supplémentaires contre les responsables.
« La reprise des combats est scandaleuse. C’est un nouveau revers. Elle aggrave les souffrances du pays. Elle tourne en ridicule les engagements pris en faveur de la paix », a déploré M. Ban lors d’une conférence de presse au siège de l’ONU, à New York.
Le Secrétaire général a tout particulièrement condamné les meurtres de deux soldats de la paix chinois de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), dont les camps et sites de protection des civils à Juba ont été pris pour cible lors de la reprise des combats dans la capitale, les 7, 8 et 10 juillet, entre soldats de l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) et de l’APLS dans l’opposition.
M. Ban a également condamné fermement les attaques aveugles contre des civils, précisant que des milliers d’entre eux ont fui leur domicile et notamment trouvé refuge dans les deux camps de la MINUSS à Juba. Il a aussi indiqué qu’au moins deux personnes déplacées ont été tuées dans les sites de protection des civils de la MINUSS dans la capitale et environ 35 autres blessées.
« Les dirigeants du Soudan du Sud ont une fois de plus abandonné leur peuple. Rarement un pays aura gaspillé aussi rapidement autant d’espoir », a dénoncé le chef de l’ONU, constatant l’échec des dirigeants du pays et appelant à ce que justice soit faite pour les atrocités commises au Soudan du Sud depuis 2013. « Ce ne sont pas seulement les dirigeants qui doivent rendre des comptes, mais toute la chaîne de commandement, y compris les chefs du personnel et autres fonctionnaires, complices de la violence », a-t-il dit.
Dans ce contexte, M. Ban a appelé le Conseil de sécurité de l’ONU à imposer un embargo immédiat sur les armes vers le Soudan du sud et à prendre des sanctions ciblées supplémentaires contre les responsables qui entravent la mise en œuvre de l’Accord de paix.
Il a aussi jugé nécessaire de renforcer les effectifs de la MINUSS, estimant qu’elle avait « désespérément » besoin d’hélicoptères de combat et d’autres matériels pour remplir son mandat de protection des civils.
Le Secrétaire général a par ailleurs exhorté le Président Salva Kiir et le Premier Vice-Président Riek Machar à désamorcer les violences et à ordonner à leurs troupes respectives de regagner leur caserne.
« Quand un gouvernement ne peut pas ou ne veut pas protéger son peuple, et quand les parties semblent uniquement résolues à s’enrichir et gagner du pouvoir au détriment de leur peuple, la communauté internationale a la responsabilité d’agir », a dit le Secrétaire général de l’ONU.