Un sprint final entre cinq skippers totalement inédit et un premier arrivé qui pourrait ne pas être le vainqueur: le dénouement du Vendée Globe se joue mercredi soir dans un suspens à couper le souffle après 80 jours de mer marqués par un sauvetage héroïque.
Par Sabine COLPART
Ils sont cinq marins, dont quatre Français, à puiser dans leurs ultimes ressources pour franchir la ligne d’arrivée au large des Sables-d’Olonne dans la meilleure position qui soit. Charlie Dalin (Apivia), l’Allemand Boris Herrmann (Seaexplorer-Yacht Club de Monaco), Louis Burton (Bureau Vallée 2), Thomas Ruyant (LinkedOut) et Yannick Bestaven (Maître Coq IV) se livrent une bataille sans merci.
Tous sont attendus dans un mouchoir de poche entre mercredi soir et jeudi matin, pour une arrivée à huis-clos en raison de la crise sanitaire liée au Covid-19.
“Ce Vendée est tellement spécial à tellement d’égards !”, lance à l’AFP Michel Desjoyeaux, seul double vainqueur du Vendée Globe (2000/2001 et 2008/2009).
“Il y a eu des un contre un dans l’histoire du Vendée Globe. Il y a déjà eu du +close combat+ mais pas à cinq bateaux comme là”, poursuit-il.
La partie devrait se jouer à presque rien. Les marins sont épuisés, leurs bateaux sont bien blessés, et des compensations de temps entrent en jeu pour deux skippers, Bestaven (10 h 15) et Herrmann (6 h), pour s’être déroutés afin d’aider aux recherches d’un concurrent naufragé, Kevin Escoffier, dont le bateau s’est brisé en deux le 30 novembre.
– “A l’intensité” –
“Ils n’ont rien à perdre et tout à gagner”, relève Desjoyeaux, qui précise que les marins ont tous en tête les compensations horaires.
“T’es obligé d’y penser ! T’es dans le même cas qu’une dernière étape d’une course en temps comme la Solitaire du Figaro. Tu sais que t’as un gars qui a une demi-heure d’avance et faut lui bouffer cette demi-heure-là”, explique-t-il.
“Ça se joue à l’intensité, la seule chose qui va faire la différence, c’est la façon dont les marins vont tenir la cadence”, prévient-il encore.
Fort de ses trois Vendée Globe, Yann Eliès va plus loin. “Il y a une vraie bagarre pour arriver en temps réel en premier. Sur certains routages on peut encore espérer que Burton et Dalin restent premiers au bout du décompte, moi j’y crois moyennement”, dit Eliès à l’AFP.
“C’est les règles du jeu, c’est une course particulière parce qu’en plus météorologiquement parlant ça n’a jamais souri aux premiers, ce n’était pas une course pour les premiers, c’est la vie”, remarque-t-il aussi.
Dalin, qui participe à son tout premier Vendée Globe, a été en tête de flotte durant plus de 60% de la course. Le marin normand de 36 ans a perdu du terrain mi-décembre après une importante avarie mais a repris la main après le passage du cap Horn.
– Compensation horaire –
Burton, lui, a connu de multiples déboires; il s’est même mis au mouillage pendant presque 48 heures pour monter au mât. Le skipper de Saint-Malo a fait une incroyable remontée de l’Atlantique pour se retrouver aux avant-postes.
Herrmann est lui aussi revenu sur le groupe de tête, sans faire de bruit. Son bateau semble en bon état et l’Allemand a dans sa besace 6 heures qui seront déduites de son temps total après passage de ligne. Ce qui fait de lui un adversaire dangereux.
Avec ses 10 heures et 15 minutes de compensation horaire, le Rochelais Bestaven est un sérieux prétendant à la victoire finale, d’autant qu’il est regonflé à bloc depuis quelques jours et file aussi vite que possible. Il faudra attendre son passage de ligne pour connaître le vainqueur du Vendée Globe.
Derrière lui, Damien Seguin (Groupe Apicil), premier marin handisport à faire le Vendée Globe, devrait couper la ligne en sixième position. Mais il pourrait bien perdre cette place au profit de Jean Le Cam (Yes We Cam !).
Le sexagénaire est celui qui a réussi à sauver Escoffier dans des conditions de mer dantesques et pour cela, il a bénéficié de 16 h et 15 minutes de compensation. Il navigue en huitième position. Trente-trois marins ont pris le départ le 8 novembre, vingt-cinq sont encore en course.
@AFP