Le Burundi a entrepris de se retirer de la Cour pénale internationale (CPI), une semaine après l’ouverture d’une enquête de l’ONU sur les violations des droits de l’Homme commises dans le pays depuis avril 2015, a-t-on appris vendredi auprès du gouvernement burundais.
“Nous avons pris cette option de nous retirer de la CPI. Le projet de loi va maintenant être envoyé au niveau de l’Assemblée nationale pour adoption”, a déclaré à l’AFP Gaston Sindimwo, premier vice-président du pays.
Le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU a annoncé le 30 septembre l’ouverture d’une enquête visant notamment 12 personnalités du régime – dont le numéro deux du pouvoir, le général Alain-Guillaume Bunyoni – soupçonnées d’avoir joué un rôle dans la commission de crimes depuis le début de la crise actuelle en avril 2015.
La procureure de la CPI a elle-même lancé en avril un examen préliminaire sur des meurtres, tortures et viols notamment, dans ce pays de la région des Grands lacs, tandis que le 20 septembre, un rapport de l’ONU a accusé Bujumbura d’être responsable de graves violations des droits, systématiques et constantes.
Ce rapport avait en outre mis en garde contre de possibles “crimes contre l’humanité” et un “grand danger de génocide”.
“On se rend parfaitement compte qu’il s’agit d’un complot (de la communauté internationale) qui vise à faire du mal au Burundi”, a ajouté le premier vice-président, évoquant “la pression” exercée selon lui par l’UE sur le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU.
M. Sindimwo a estimé vendredi que la CPI est un “moyen politique” utilisé par la communauté internationale pour “opprimer les pays africains”, se faisant l’écho de critiques récurrentes de certains pays africains contre la CPI.
Le Burundi est plongé dans une grave crise depuis que le président Pierre Nkurunziza a annoncé en avril 2015 sa candidature à un troisième mandat, qu’il a obtenu en juillet de la même année au terme d’une élection boycottée par l’opposition. Les violences ont fait plus de 500 morts et poussé plus de 270.000 personnes à quitter le pays.
“C’est un signe très négatif de la part du gouvernement burundais, qui réagit très durement dès que des organisations critiquent les multiples violations des droits de l’Homme qui ont cours au Burundi”, a réagi Carina Tertsakian, spécialiste de l’Afrique pour l’ONG Human Rights Watch.
“Cela montre le durcissement du pouvoir et aussi son déni par rapport aux graves exactions qui sont en train d’être commises”, a-t-elle ajouté.
Mme Tertsakian assure en outre qu’un retrait du Burundi de la CPI ne lui permet pas de se soustraire à la justice internationale.
La CPI ne peut certes pas enquêter de sa propre initiative sur un pays non membre, mais elle peut le faire si le Conseil de sécurité de l’ONU l’y autorise, comme ce fut le cas pour le Darfour (2005) et la Libye (2011).
De plus, le statut de Rome, traité fondateur de la CPI, stipule que “le retrait prend effet un an après la date à laquelle la notification a été reçue, à moins que celle-ci ne prévoie une date postérieure” et “n’affecte en rien la poursuite de l’examen des affaires que la Cour avait déjà commencée à examiner avant la date à laquelle il a pris effet”.
Source: AFP