Mali: l’ex-rébellion privilégie la piste de l’assassinat dans la mort de son chef militaire

Mali: l'ex-rébellion privilégie la piste de l'assassinat dans la mort de son chef militaire

L’ex-rébellion à dominante touareg du nord du Mali privilégiait dimanche la thèse d’un assassinat dans la mort de son chef militaire, la veille dans une explosion à Kidal, théâtre de récents combats entre groupes signataires de l’accord de paix.

Les conséquences sur le processus de paix de la mort de Cheikh Ag Aoussa, considéré comme “un faucon” de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA, ex-rébellion), au sortir d’une réunion au camp de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma), apparaissaient incertaines dans l’immédiat.

La CMA a demandé “instamment à la Minusma et à (la force française) Barkhane de collaborer avec elle pour l’ouverture d’une enquête diligente sur les circonstances de cet assassinat odieux incontestablement prémédité”, selon un communiqué publié dimanche.

Un élu de Kidal (nord-est) et une source militaire africaine au sein de la Minusma ont affirmé à l’AFP qu’il avait été tué par l’explosion d’une mine au passage de sa voiture, mais selon l’ex-rébellion l’explosif a été placé sur le véhicule, accréditant plutôt la thèse d’un assassinat.

Il est sorti de la réunion samedi avec quatre autres dirigeants de la CMA, en compagnie desquels il a accompli la prière du crépuscule devant le camp, puis tous sont repartis, l’explosion s’étant produite peu après, à quelques centaines de mètres, selon un document interne de la CMA consulté par l’AFP.

La réunion à laquelle Ag Aoussa assistait, parmi d’autres responsables militaires de la CMA, se tenait au camp de l’ONU “tous les 15 jours, avec la force de la Minusma et Barkhane” sur la sécurité à Kidal, a précisé à l’AFP la porte-parole en chef de la Minusma, Radhia Achouri.

L’explosion s’est produite vers 18H00 (locales et GMT) à environ 300 mètres du camp, a-t-elle indiqué, soulignant la difficulté d’établir dans l’immédiat la nature de l’engin à l’origine de la déflagration sans l’avis d’experts.

L’ex-rébellion a souligné dimanche que “comme d’habitude, les véhicules des représentants de la CMA étaient stationnés à l’intérieur du camp de la Minusma pendant toute la durée de la réunion”.

“Tous les constats ont écarté le passage sur une mine: la voiture était donc piégée et il s’agit d’un assassinat ciblé. Tout porte à croire que l’engin explosif a été placé sur le véhicule du défunt pendant la réunion et dans l’enceinte du camp”, selon la CMA.

– Ancien jihadiste –

Des combats meurtriers pour le contrôle de Kidal ont opposé en juillet, août et septembre la CMA au Groupe d’autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia, pro-gouvernemental).

Ces hostilités entre groupes pourtant tous signataires de l’accord de paix de mai-juin 2015 inquiètent la communauté internationale, qui a menacé à plusieurs reprises ces dernières semaines de “sanctions ciblées contre ceux qui entraveraient la mise en œuvre de l’accord”.

Touareg de la tribu des Ifoghas, Cheikh Ag Aoussa était le numéro deux du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), formé en grande partie d’anciens membres du groupe jihadiste Ansar Dine, dirigé par une personnalité très influente parmi les Ifoghas, Iyad Ag Ghaly.

Dans un enregistrement sonore il y a un an, Iyad Ag Ghaly avait menacé les groupes signataires de l’accord de paix, les accusant de trahison.

Au déclenchement de la rébellion de 2012, Cheikh Ag Aoussa était le bras droit du chef d’Ansar Dine.

Mais juste après l’intervention française de janvier 2013, les routes des deux hommes s’étaient écartées et il avait rejoint le Mouvement islamique de l’Azawad, qui deviendra en mai 2013 le HCUA.

Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, à la faveur de la déroute de l’armée face à la rébellion, un temps alliée à ces groupes, qui l’ont ensuite évincée.

Les jihadistes en ont été en grande partie chassés après le lancement en 2013, à l’initiative de la France, d’une intervention militaire internationale, qui se poursuit actuellement.

Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes et étrangères, malgré la signature, sous pression de la communauté internationale, de l’accord de paix censé isoler définitivement les jihadistes, dont l’application accumule les retards.

Deux Casques bleus tchadiens, au moins trois militaires et un civil maliens ont été tués cette semaine dans des attaques imputées aux jihadistes dans le nord du pays.

Source: AFP