Avant même que son investiture ne s’achève, une procédure d’impeachment a été lancée contre Donald Trump. Deux organisations luttant pour les droits civiques, Free Speech for People et RootsAction ont lancé une pétition via le site internet www.impeachdonaldtrumpnow.org en vue, de rassembler suffisamment de signatures pour demander au congrès de mettre fin au mandat du nouveau président américain.
Par Olivier Allocheme
Investi ce vendredi 20 janvier 2017, Donald Trump doit affronter un mouvement de contestation sans précédent dans l’histoire américaine. Plus d’un million de femmes ont manifesté samedi dans quatre cents villes des Etats-Unis. Ailleurs dans le monde, les manifestations ont eu lieu dans soixante-six autres pays, selon Le Monde qui énumère: le Canada (vingt-sept villes), le Mexique (dix-sept villes), la Grande-Bretagne (quatorze villes) ou encore la France (neuf villes). Il faut dire ce qui est : alors qu’en 2009, le discours inaugural d’Obama avait cristallisé tous les espoirs, celui de Trump provoque colère et tristesse aux Etats-Unis et dans le monde.
Le nouveau président américain, comme à son habitude, n’a pas daigné laisser place à une once de sentimentalisme, passant au vitriol , le bilan de son prédécesseur et promettant à ses compatriotes un protectionnisme ferme. « Nous avons rendu les autres pays riches au moment où la richesse et la confiance de notre pays se sont dissipées à l’horizon…La protection mènera à une grande prospérité et à une grande force », a-t-il indiqué avant de poursuivre : « Nous protègerons nos frontières des ravages des autres pays. » Comme sur un air de campagne électorale, Trump président annonce le leitmotiv de son pouvoir : « America first » (« L’Amérique d’abord »). Ce slogan rappelle “l’America First Committee”, un mouvement protectionniste fondé en Septembre 1940 par des pro-nazis aux Etats-Unis.
Le discours de Trump annonce, en tout cas, de profonds bouleversements dans l’ordre du monde. Ce n’est donc pas pour rien que dès ce lundi 23 janvier, il a signé un document mettant fin à la participation des Etats-Unis au traité de libre-échange trans-pacifique (TPP) regroupant 12 pays d’Asie-Pacifique et représentant 40% de l’économie mondiale. Trump entend renégocier également le traité de libre échange nord-américain (ALENA) conclu en 1994 avec le Canada et le Mexique. Il avait menacé de sortir les Etats-Unis de l’OTAN, organisation militaire créée en 1949 ou encore le TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership), un accord de libre échange conclu avec l’Union Européenne.
Et la question que tout le monde se pose est celle-ci : que fera-t-il de l’Afrique ?
Dans un court document de 4 pages, l’équipe de Trump a posé les bases de sa politique africaine, la semaine dernière. Elle a posé une question basique : « Pourquoi devrions-nous dépenser autant de fonds dans l’aide au développement en Afrique alors que des gens souffrent ici aux États-Unis ? » En 2015, le pays a dépensé 31 milliards de dollars dans l’aide au développement (soit 1% de son budget), dont 8 milliards en direction de l’Afrique. Depuis 2000, l’administration américaine a institué l’African Growth Opportunity Act (AGOA) qui a permis de vendre pour 480 milliards de dollars de produits africains sur le sol américain, en créant 300.000 emplois en Afrique et 120.000 aux Etats-Unis. Georges W. Bush a aussi institué le Millenium Challenge Account (MCA) qui a investi par exemple au Bénin 307 millions de dollars de 2006 à 2011. Pour le second compact du MCA signé en septembre 2015, les Etats-Unis s’apprêtent à investir au Bénin environ 375 millions de dollars (soit environ 187 milliards de francs CFA), notamment dans un secteur vital comme l’énergie. Ce dernier compact vient en droite ligne de l’initiative « Power Africa » lancée par Barack Obama en vue de produire 30.000 Mw d’électricité et d’effectuer 60 millions de branchements sur le continent africain. Pour 2017, Obama avait proposé un budget de 18,1 milliards d’aide au développement en faveur des pays pauvres.
Tout en investissant ces montants en Afrique où le pays est le premier contributeur aux investissements directs étrangers, les Etats-Unis ont été devancés depuis 2009 par la Chine en matière de commerce sur le continent. Rien qu’en 2016, selon Janet Eom, directeur de recherche à la China-Africa Research Initiative, une institution de la Johns Hopkins University, la Chine a exporté pour environ 103 milliards de dollars en Afrique au moment où les Etats-Unis faisaient seulement 27 milliards sur le continent. Est-ce que tous ces facteurs ne vont pas inciter l’administration Trump à annuler une bonne partie des programmes actuellement en cours sur le continent ? Beaucoup d’observateurs répondent par l’affirmative. Cependant, J. Peter Pham, pressenti pour être le Monsieur Afrique de Trump, tempère. Il laisse entendre qu’il n’y aura pas de changements majeurs à cet égard. Je veux bien le croire.
Ce qui est clair, le protectionnisme et l’isolationnisme américains ouvriront un boulevard à la Chine pour régenter l’économie mondiale. Vous m’avez bien compris : le déclin des Etats-Unis en tant que superpuissance mondiale n’a jamais été aussi proche.