Mozambique: aux obsèques de Dhlakama, le président poursuit sur le chemin de la paix

Des soldats de l'armée mozambicaine portent le cerceuil de l'ancien leader du parti, Afonso Dhlakama, le 9 mai 2018 à Beira, dans le centre du Mozambique | AFP | ADRIEN BARBIER

Le président mozambicain Filipe Nyusi s’est engagé à poursuivre les discussions de paix avec le principal parti d’opposition Renamo, mercredi devant des milliers de personnes réunies pour un dernier hommage au chef de l’ex-guérilla Afonso Dhlakama.

Dirigeant historique de la Résistance nationale du Mozambique (Renamo) depuis trente-neuf ans, Afonso Dhlakama est mort le 3 mai à l’âge de 65 ans des suites d’une maladie dans son camp retranché des montagnes de Gorongosa (centre). Son décès inattendu a plongé le pays dans l’incertitude alors qu’il négociait depuis plusieurs mois un accord de paix avec le président Nyusi, son éternel rival.

Mercredi, le chef de l’Etat a voulu rassurer la population mozambicaine, meurtrie par une très longue et meurtrière guerre civile (1976-1992) et la reprise de combats sporadiques en 2013. La Renamo avait alors repris le maquis pour dénoncer la mainmise du parti au pouvoir (Frelimo) sur le pays.

« Je continuerai sur le chemin que nous avons entamé ensemble, celui qui conduit à la paix », a assuré M. Nyusi à Beira (centre-est), en prononçant l’éloge funèbre de M. Dhlakama.

« Nous serons satisfaits de pouvoir continuer le projet de paix que nous avions engagé ensemble », a-t-il insisté, appelant la Renamo « à continuer avec sérénité sur ce chemin ». De leur côté, les dirigeants de l’ancienne rébellion ont profité des obsèques nationales offertes à leur « lider » pour promettre à leurs partisans de continuer la lutte contre le pouvoir.

« Toi, le père, tu nous as appris à nous sacrifier pour le pays », a rappelé le chef par intérim de la Renamo, Ossufo Momade. « Le temps est venu pour nous de faire avancer ta lutte », a-t-il ajouté devant la foule réunie sous un soleil de plomb.

« L’homme qui nous a protégés de la tyrannie, de la dictature, de ceux qui utilisent la richesse du pays à leur fin est parti », a renchéri la chef des députés de la Renamo, Ivone Soares. « Vous les jeunes, soyez inspirés par Dhlakama. Soyons tous des Dhlakama, partout », a-t-elle lancé sous les applaudissements.

– « Guide suprême » –

Sur un ton ferme, Mme Soares aussi rappelé la principale revendication de la Renamo dans les discussions avec le régime. Son aile armée « doit être intégrée dans l’armée nationale », a-t-elle insisté, avant d’accuser le gouvernement d’avoir indirectement tué son oncle. « La violence indirecte tue plus que la violence directe », a lâché Ivone Soares.

Des milliers de partisans de la Renamo sont venus saluer leur « guide suprême » mercredi à Beira, la capitale de la province de Sofala d’où il était originaire. Son cercueil, enveloppé dans un drapeau du Mozambique et gardé par des soldats de l’armée régulière, a été exposé sur une estrade sur la place centrale de la ville noire de monde.

« C’est une perte irréparable. Afonso Dhlakama est le fondateur de la démocratie au Mozambique », a estimé dans la foule un partisan de la Renamo, Eufrasia Jordao. « Mais on ne va pas céder. Le parti est mature. Les gens sont déterminés à ne pas battre en retraite dans la bataille pour la démocratie », a-t-il assuré à l’AFP.

« Viva Afonso Dhlakama”, “Viva Renamo”, a crié un homme torse nu avant le début de la cérémonie. La police a bien tenté de le faire taire, mais sous la pression de la foule, y a renoncé. « Il n’y a rien de plus à faire en ce moment que de rendre hommage au fondateur de la démocratie », a jugé José Chitula, un ancien de la Renamo passé dans un autre parti d’opposition, le Mouvement démocratique du Mozambique (MDM).

« La mort d’Afonso Dhlakama ne peut pas être une excuse pour revenir au système de parti unique » en vigueur de l’indépendance en 1975 à 1990, a-t-il prévenu. Le chef de l’opposition doit être enterré jeudi dans son village natal de Mangunde, à plus de 200 km au sud-ouest de Beira.

Source: AFP