L’officialisation de la victoire au Plateau, le quartier des affaires d’Abidjan, du candidat du Parti démocratique de Côte d’Ivoire qui avait claqué la porte de la coalition gouvernementale en août, a fait baisser la tension dans la capitale économique au moment où des incidents se sont produits dans l’intérieur du pays, notamment à Grand Bassam.
Par David ESNAULT et Patrick FORT
“Eh-oh, Ehouo! Ehouo!”, ont scandé les partisans de Jacques Ehouo au moment de l’annonce par la Commission électorale indépendante (CEI) de la victoire de leur candidat au Plateau, la commune la plus riche du pays. Au QG de campagne, les militants ont explosé de joie et plusieurs milliers de personnes ont afflué pour fêter la victoire, chantant et dansant.
La tension était déjà retombée dans la matinée, leur adversaire, Fabrice Sawegnon, ayant déjà reconnu sa défaite sur les réseaux sociaux: “Les derniers dépouillements ne sont pas en notre faveur. Malgré tous les éléments de recours documentés dont nous disposons, nul engagement, nulle conviction ne vaut la paix et la stabilité”.
Ce duel entre Sawegnon, spécialiste de la communication ayant orchestré les campagnes de plusieurs chefs d’Etat africains, soutenu par la coalition du président Alassane Ouattara, et Jacques Ehouo, le député de la circonscription surnommé “Sans bruit”, était l’un des affrontements phare des municipales du 13 octobre.
M. Sawegnon avait fait une grosse campagne pour prendre la mairie de la commune la plus riche du pays, contrôlée jusqu’en août par Noël Akossi Bendjo, membre du PDCI. Celui-ci avait été révoqué pour détournement de fonds mais plaidé son innocence.
L’annonce des résultats au Plateau a donné lieu à un imbroglio électoral. Samedi soir, une fois le dépouillement terminé, la Commission électorale du Plateau n’a pas procédé à la compilation des voix en raison de l’absence mystérieuse de ses deux présidents. Après une nuit de tension, les urnes avaient été transférées dimanche à la CEI départementale. Les forces de l’ordre y avaient alors dispersé les manifestants avec des gaz lacrymogènes. En début d’après-midi, lors de la compilation, la CEI, sans proclamer de résultats, avait semblé donner la victoire à M. Sawegnon, malgré les protestations des représentants de M. Ehouo.
– Barrages et blessés à Bassam –
Dimanche soir, la dispersion d’une marche de plusieurs centaines de personnes soutenant M. Ehouo avait donné lieu à des échauffourées.
La coalition au pouvoir (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix) continuera toutefois à contrôler la capitale économique puisque elle remporte notamment les communes de Koumassi, Treichville ainsi que les deux grands quartiers populaires de Yopougon et Abobo.
Parmi les autres résultats, la CEI a annoncé la victoire à Grand Bassam du RHDP, générant des troubles dans la cité balnéaire où le RHDP et le PDCI réclamaient tous deux la victoire. Des jeunes ont érigé des barrages en début d’après-midi dans le quartier France. Plusieurs personnes avaient été blessées dans la nuit de dimanche dans une charge de la police contre des habitants qui réclamaient la proclamation des résultats.
A Daloa (centre-ouest), une trentaine de jeunes ont fait irruption à la CEI locale et ont emporté un sac contenant des procès-verbaux des élections, selon l’agence indépendante Alerte-Info
“Je m’étonne de l’immixtion du chef de l’Etat (Alassane Ouattara) dans les proclamations des résultats de cette élection” a accusé lundi l’ancien président Henri Konan Bédié, le chef du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), à l’issue du congrès extraordinaire de son parti.
Plus de six millions d’Ivoiriens étaient appelés à voter à ces élections locales, dont le principal enjeu était de mesurer les forces en présence avant la présidentielle de 2020, notamment parmi les membres de l’ex-coalition au pouvoir.
Principalement composée du PDCI et du parti du président Ouattara, le Rassemblement des républicains (RDR), la coalition au pouvoir, le RHDP a explosé.
Le PDCI a refusé de s’y maintenir, estimant que le parti de Ouattara tentait de l’absorber pour pouvoir présenter son candidat à la présidentielle.
Le PDCI, qui a soutenu Ouattara en 2010 et 2015, entendait que le RDR lui rende la pareille en 2020 en soutenant un candidat PDCI. Le parti tenait lundi un congrès extraordinaire. Lors du congrès extraordinaire, le PDCI a validé la tenue d’une convention pour désigner son propre candidat à la présidentielle.
Source: AFP