Pays-Bas: verdict dans l’appel de quatre fermiers nigérians contre Shell

Les fermiers nigérians au tribunal de La Haye le 11 octobre 2012 (ANP/AFP/Archives - ROBIN UTRECHT)

La justice néerlandaise se prononce vendredi en appel dans le procès intenté par quatre fermiers nigérians contre le géant pétrolier Shell, qu’ils jugent responsable de fuites de pétrole ayant détruit trois villages dans le delta du Niger.

Par Sara MAGNIETTE

Soutenu par Milieudefensie – branche aux Pays-Bas de l’organisation internationale les Amis de la Terre -, ces quatre fermiers et pêcheurs nigérians ont saisi la justice en 2008, demandant que l’entreprise anglo-néerlandaise paie les travaux de dépollution et leur verse des indemnités.

Les plaignants, dont deux sont décédés depuis le début de cette bataille judiciaire vieille de 13 ans, réclament également que Shell nettoie les dégâts dans leurs villages, Goi, Ikot Ada Udo et Oruma, dans le sud-est du Nigeria.

Plus gros producteur de pétrole en Afrique avec 2 millions de barils exporté chaque jour, le Nigeria est le théâtre depuis 50 ans d’une exploitation pétrolière extrêmement polluante.

“Pour les habitants du delta du Niger, il est crucial que leurs terres soient nettoyées et que leurs récoltes et leurs moyens de subsistance perdus soient indemnisés par la partie coupable: Shell”, a estimé Donald Pols, le directeur de Milieudefensie, dans un communiqué en marge du verdict.

La Cour d’appel de La Haye rendra son jugement à 11H00 (10H00 GMT). Les deux parties auront ensuite la possibilité de se pourvoir en cassation.

– Responsabilité environnementale –

En 2015, la Cour d’appel avait déclaré la justice néerlandaise compétente pour statuer dans l’affaire, annulant une décision rendue en 2013 en première instance, selon laquelle la maison-mère de Shell – dont le siège social se trouve à La Haye -, ne pouvait être tenue responsable des éventuelles négligences de sa filiale au Nigeria.

La filiale nigériane de Shell avait elle été tenue partiellement responsable et condamnée à verser des indemnités à l’un des quatre plaignants.

Les deux parties avaient interjeté appel.

Dans le cas d’une décision favorable aux plaignants vendredi, cette affaire pourrait faire jurisprudence en matière de responsabilité environnementale.

“Une victoire annoncerait le début d’une nouvelle ère dans laquelle les grandes multinationales telles que Shell ne pourront plus vaquer à leurs occupations sans loi mais seront responsables de l’ensemble de leurs opérations, y compris à l’étranger”, explique M. Pols.

Shell a de son côté toujours attribué la pollution à du sabotage et assure avoir nettoyé les lieux. Le géant pétrolier a par ailleurs rejeté la compétence de la justice néerlandaise, estimant qu’un éventuel procès devrait être organisé au Nigeria, là où les faits se sont déroulés.

Dans une affaire distincte également contre Shell aux Pays-Bas, quatre veuves nigérianes accusent la compagnie d’avoir contribué à l’arrestation de leurs époux, exécutés par le régime militaire dans les années 1990, alors que ces derniers tentaient de perturber de manière pacifique le développement pétrolier en pays ogoni (sud du Nigeria).